WALLPAPER #265

 

Bodil Blain rattrape le temps perdu autour d'un café avec Mathias Kiss.

 

BB - Buvez-vous du café ? 


MK - Je prends mon café court, serré, fort.

 

 

BB - Étiez-vous un enfant créatif ?

 

MK - J'ai toujours évité la vie quotidienne, les groupes et les institutions. Je me sentais piégé sur un banc d'école et je me sentais piégé à faire des choses que je devais faire. À 14 ans, j'ai été renvoyé de l'école. C'est alors devenu mon chemin de travailler contre le fait d'être catégorisé. Je trouve étrange l'idée d'étudier et de passer un diplôme d'artiste - c'est le contraire de la liberté.

 


BB - Quel a été votre parcours créatif et comment vos procédés se sont-ils développés ? 


MK - J'ai rejoint les Compagnons du Devoir, une organisation française d'artisans datant du Moyen Âge. Leur éducation traditionnelle et technique passait par un apprentissage auprès de maîtres qui m'ont imposé un parcours esthétique et technique. Ma démarche est alimentée par ma réaction à cette expérience, et le besoin de changer l'immobilisme et la rigueur du classicisme, de libérer les formes et les matériaux. Mon travail consiste à enlever le cadre, c'est mon combat.


BB - Que représentent les miroirs dans votre travail ? 


MK - Les miroirs représentent le luxe et le narcissisme. Ils sont inflexibles, tout comme l'image que vous avez de vous-même et de la vie qui vous entoure. Je veux que mon travail déconstruise l'image de soi et l'image de la société. Les miroirs sont fragiles et pourtant menaçants, car nous pouvons nous voir. Ils sont vivants et organiques, mon travail consiste à les libérer.


BB - Pouvez-vous expliquer l'installation au Palais des Beaux-Arts de Lille ? 


MK - J'avais l'habitude de peindre des ciels lorsque j'étais apprenti peintre en restauration de monuments historiques chez les Compagnons du Devoir. Créer le ciel du Palais était un rêve d'enfant, redonner à cette verrière triste et impersonnelle le romantisme et les mouvements par la lumière naturelle à travers la transparence de mon ciel était un merveilleux cadeau. La lumière changeante au fil des heures et des saisons le faisait bouger et évoluer, c'était magique. En dessous, j'ai créé un bassin de miroirs débordants pour le voir dans le reflet, et le dialogue entre plafond et bassin était un bel hommage aux compositions des grandes époques de la peinture à l'huile. Le tout vivant et accessible aux non-initiés, ce qui est toujours important pour moi. 

 

BB - Où peut-on actuellement voir votre travail et les choses à venir ? 


MK - Dans mon nouvel atelier, ouvert sur rendez-vous, à Paris dans le 19th arrondissement.

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